Si certains chefs s'essaient à
une cuisine moderne et fusion, d'autres vont plutôt tenter de nous
offrir à goûter ce qu'était l'authentique cuisine ottomane.
Si Asitane entre dans cette
seconde catégorie, l'établissement va même plus loin : les chefs
ont tenté un travail d'archive en se plongeant dans les registres
palatiaux des cuisines des sultans, antiques livres de cuisine ou
relevés des stocks, passant de nombreuses années en recherches et
essais pour faire renaître l'art culinaire qui s' opérait dans les
cuisines de Topkapı, Edirne et Dolmabahçe.
Et c'est réussi ! En résulte une
carte toute composée de mets impériaux, nous faisant voyager de
1453 à 1918 à travers les produits, les épices, les saveurs.
L' Asitane est un restaurant
d'hôtel chic et élégant situé dans un quartier ancien, un brin
défavorisé mais magnifiquement établi aux côtés de l'une des (si
ce n'est la) plus belles et mieux préservées églises byzantine
encore debout.
Au rez inférieur de cet hôtel
s'ouvre une splendide et rafraîchissante terrasse toute entourée de
verdure, peuplée de larges tables espacées recouvertes d'épaisses
nappes blanches et simplement dressées, un rien fleuries, qui est
bordée par la salle du restaurant blanche et boisée, très
raffinée.
Sans attente, je suis pris en
charge par des serveurs très aimables et au professionnalisme qui
n'est plus à prouver et mené à ma table. De l'eau m'est apportée
(j'en serai copieusement abreuvé toute la soirée) ainsi que la
carte. Tout a l'air si succulent que le choix est cornélien. Je
sélectionne (à grande tristesse) et patiente.
On m'apporte dans un premier temps
un excellent pain blanc, un rien brioché et avec une sensible touche
de cannelle. Avec cela, un petit concassé de pois chiches très
joliment parfumé avec une huile excise d'olive, un rien piquante et
bien herbeuse, augmentée de piment concassé et de thym sauvage.
Suit mon choix d'entrées :
d'abord une soupe aux amandes épaisse, crémeuse et gourmande à
souhait, riche en saveur et juste parfumée d'une note de muscade et
de grenade.
Puis un quatuor de petites purées
au doux nom de « Douceurs d'Asitane » :
Une quenelle de fèves riches en
saveurs simplement augmentées d'aneth et d'huile d'olive.
Une quenelle de yaourt au
concombre parfumée d'oignons et un rien de pistache.
Une quenelle au fromage frais
sensiblement granuleux, parfumé au poivrons tomate, échalote et
persil, avec un rien de romarin.
Enfin une quenelle aux pois
chiches augmentées richement de noix et de pignons bien présents,
de la cannelle et un petit goût fruité qui s'est avéré être de
la groseille.
Ce plat offre une belle variété
de saveurs, de couleurs et d'odeurs, c'est frais, parfumé et
délicieux.
En plat, j'ai demandé un
« Mahmudiyye ». Il s'agit d'un ragoût
de poulet mijoté dans un jus garni d'abricots, raisins secs Rezaki
et les amandes, le tout richement parfumé de cannelle et de girofle.
Ce plat est d'un équilibre en bouche, la viande d'une tendreté,
c'est fruité, fin, parfumé ; absolument excellent.
Enfin, pour atterrir en douceur,
un dessert s'impose. Le choix reste extrêmement difficile mais
sachant que j'adore les cerises qui poussent sous le soleil turc, je
me lance pour un dessert au pain, imbibé de sirop de cerise et
richement garni de cerises à l'intérieur, le tout couronné d'une
quenelle de glace à la vanille tout à fait excellente.
Je n'ai pas
fait honneur à la carte des vins, qui pourtant est superbe... Il
faisait trop chaud et en solitaire, je n'avais pas autrement envie de
trinquer. En plus de l'eau, j'ai dégusté une excellente limonade
maison bien acidulée et pas trop sucrée, et un café turc pour le
dessert, servis avec deux petits loukoums de bonne qualité.
Le tout pour 81.50 TL, une bouchée
de pain au vu des lieux, de la qualité du service et des plats
consommés, des années de travail qu'il a fallu pour faire renaître
ces mets de palais, pour manger comme un sultan et voyager dans le
temps... Bravo !
Les sultans savaient vivre !
Prenez de temps de vous sentir sultan le temps d'une soirée !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire