Un « bistrot »
libanais à ouvert à Lausanne ? Intéressant. Encore plus
intéressant quand il semble remporter tous les suffrages dès son
ouverture, deux petits mois auparavant.
Ouvert tout dernièrement, le
Keyann est la réalisation du rêve d'un diplômé déjà de longue
date de la prestigieuse École Hôtelière de Lausanne, Jean-Pierre
Mermoud, le rêve de partager ses origines libanaises avec le public
Lausannois. Le concept et la carte sont entièrement de son cru, et
comme on le verra plus tard, c'est une réussite !
J'ai résisté deux mois avant d'y
foncer, et m'y voici, ce 15 mars 2014. Il est situé dans les bas de
la ville de Lausanne, à la lisière d'Ouchy, un espace calme et
agréable pour accueillir ce petit coin d'orient. On choisira
volontiers les transports publics pour s'y rendre, si l'on ne
souhaite pas se débattre et tournicoter pour trouver une place de
parking.
Une lueur chaude nous accueille
dès l'extérieur. Une terrasse modeste et néanmoins charmante se
trouve devant, comme une estrade en bois, et on pénètre ce
minuscule établissement apte à accueillir 15-20 convives.
Droit en face, le bar composé de
frigos et plateaux dans lesquelles reposent tantôt brochettes,
tantôt mezzés, tantôt desserts. A l'arrière, une cheminée à
grillades et tout le matériel nécessaire au service. Dans la petite
salle, une série de tables en bois simplement dressées avec des
sets à l'effigie du Keyann sont alignées contre des murs fuchsia ou
orange-beige fort à propos avec la thématique et les chaises
augmentées de coussins quadrillés saumon-blanc.
Le patron nous accueille avec une
grande hospitalité et simplicité : on se sent accueillis à la
maison, invités à la table d'hôtes. On nous installe à table et
apporte la carte. Celle-ci est petite et très bien constituée de
quelques mezzés froids, chauds, salades et brochettes, le tout de
préparation maison, tout de tradition et de promesses de saveurs.
Quelques suggestions de menus viennent compléter la proposition.
Notons encore une jolie carte de boissons avec des traditionnels sans
alcools comme des vins du Liban de bonne réputation.
Malgré la petitesse de cette
carte, impossible de faire un choix, tout est prometteur et
appétissant. Nous cédons donc à la proposition d'un menu nommé
« Taste Lebanon » essentiellement composé de mezzés
froids, grillades et desserts à partager, comprenant en boisson une
bouteille de vin.
Le repas se déroulera en trois
vagues :
d'abord les mezzés froids.
D'abord, une assiette de pain plat libanais juste préalablement
passé au grill nous est porté, puis quatre plats :
Une assiette de « Hommos »,
gourmande purée de pois chiche ici onctueuse à souhait, de texture
et de saveurs parfaite, une pointe d'excellente huile d'olive et
juste rafraîchie de ce trait de citron qui tend si souvent à
manquer.
Une assiette de « Moutabal »,
un caviar d'aubergines grillées entières, presque brûlées à
l'extérieur. La chair, ayant compoté et pris un petit goût de
fumé, est ensuite récupérée et assaisonnée au goût du chef, au
plus traditionnel de la crème de sésame. A nouveau, quoiqu'hors
saison, la préparation et les saveurs sont parfaites et n'ont rien à
envier à une autre prestation.
Le « Chanklich » nous
est également servi, un fromage de brebis frais et à peine acidulé,
très gourmand, fondant et un poil grumeleux, dans une forme de
croûte de za'tar, ce mélange essentiellement composé de de thym
sauvage et sésame torréfié et de sumac. Le fromage est une
production maison et la qualité est des meilleures. Ajoutons
quelques dés d'oignons, tomate et une très bonne huile d'olive,
quelques herbes et le plat est fait !
Enfin (pour le froid), le
« Tabbouleh », salade essentiellement composée de persil
plat (et pas de boulghour en élément principal, encore moins de
couscous), relevée de menthe, une poignée de boulghour bien
réhydraté, oignons, tomate, juste parfumée d'huile d'olive et de
citron, un temple de fraîcheur et de plaisir.
Passons
au chaud. Il nous était donné de choisir quatre brochettes qui
seront accompagnées de sauces et de pommes de terre. Ce sera deux
« Chich taouk », brochettes de blanc de poulet marinés à
l'ail et citron. La chair est parfaitement cuite et néanmoins
tendre, assaisonnée délicatement et tout en fraîcheur. Ajoutons
une « Kafta », brochette de viande hachée boeuf-agneau
aux épices, avec une cannelle qui me revenait délicatement en
arrière palais, vraiment la brochette de la soirée, tout en
moelleux et en saveur. Enfin une Michoueh, un boeuf mariné plus
« viandesque » en saveur et néanmoins parfait. Notons
que les viandes proviennent soit de Suisse, soit de France et sont
d'une extrêmement bonne qualité.
En accompagnement, une portion de
« pommes de terre Keyann », juste des dés rôtis
parfumés d'ail, citron et un peu de coriandre, un plaisir simple.
Les sauces ne sont pas en reste !
L'une est tomatée aux saveurs légèrement relevées, la
« Tarator », crémeuse, au sésame et citron et enfin une
sauce à l'ail qui fera fuir les vampires de vos nuits, et même vos
meilleurs amis s'ils n'ont pas mangé avec vous mais qui donnera
tellement de plaisir qu'elle vaudra bien un petit sacrifice.
Dans la théorie, les deux
convives, pour ce menu, devraient recevoir le même dessert, à
savoir l'Atayef. De sorte à goûter à plusieurs choses, nous en
avons troqué un contre le «Succès au chocolat façon Aïda ».
L'Atayef consiste en de de petites
crêpes libanaises dont la pâte est légèrement parfumée d'eau de
fleur d'oranger et est légèrement aérée, comme s'il y avait
légèrement emploi de poudre à leverm un résultat moelleux et
gourmand fourré d'une crème onctueuse de lait à la fleur
d'oranger. Le croquant manquant sera apporté avec une poignée de
pistaches et le tout sera lié de sirop de sucre en fine quantité. A
ses côtés, une coupelle de jus d'orange amères assez corsé et
plaisant avec le sucré du dessert. Un grand plaisir.
Le succès est à l'origine un
dessert de pâtisserie désignant un gâteau, généralement rond,
dans lequel repose deux couches de biscuit meringué aux amandes avec
une crème (au beurre ou pralinée par exemple) intercalée. Ici une
petite variation sur le thème avec un gâteau gourmand et
délicieusement fondant à base d'une ganache chocolatée épaisse,
franche en saveurs, dans laquelle sont émiettés des morceaux de ce
biscuit meringué aux amandes. C'est juste gourmand, réconfortant et
délicieux !
Côté boissons, impossible de
résister en apéritif à la citronnade maison très fraîche, pas
trop sucrée, parfumée de menthe et de fleur d'oranger.
Le repas s'est vu arrosé d'eau
gazeuse et d'un joli vin libanais, le Clos St-Thomas « Les
Gourmets » Rouge 2009, un joli vin de la vallée du Bekaa à
l'est du Liban ; assemblage de Cabernet Sauvignon, Syrah et
Cinsault, c'est un vin assez complexe, tout de fruit rouge et épices,
intense quoiqu'aux tanins assez soyeux donc d'une grande buvabilité.
Il fut très apprécié. Il fut certes servi un poil chaud mais cela
ne lui a pas nuit !
Enfin,
un petit Jellab, une boisson à base de dattes douce et
rafraîchissante, plus pour une terrasse en plein été qu'après
repas, mais je n'ai pu y résister.
Pour ma convive, ce fut un verre d'un vin doux libanais, un Château Kefraya "Lacrima d'Oro" 2004 à 13.- le déci tout de même mais qui s'est avéré, aux dires de la dégustatrice, succulent. Au final, une addition d'à peu près de 153 CHF.
Pour ma convive, ce fut un verre d'un vin doux libanais, un Château Kefraya "Lacrima d'Oro" 2004 à 13.- le déci tout de même mais qui s'est avéré, aux dires de la dégustatrice, succulent. Au final, une addition d'à peu près de 153 CHF.
Quelle découverte que ce Keyann!
Les produits sont manifestement sélectionnés avec un grand soin et
travaillés avec respect, savoir faire et tradition.
Ce petit lieu donne un côté
familial extrêmement confortable et sympathique et la présence en
salle du patron souriant, simple et attentif, ne peut que souligner
cette impression.
Autant dire que cela sera un
bonheur d'y retourner ! Les cinq sens sont flattés par
l'agencement simple et joli des lieux, les parfums tantôt frais,
tantôt chauds d'épices que l'on retrouve au palais, les textures et
cuissons parfaites et l'ambiance familiale. Bravo à M. Jean-Pierre
Mermoud pour son excellent travail et sa belle initiative de combler
un élément manquant dans le monde de la table lausannoise.
1007 Lausanne
Vaud, Suisse
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