Ce n'est pas la première fois que j'ai l'heur de me rendre au
Berceau des Sens qui une fois encore a su me prouver, s'il le fallait
vraiment, qu'il portait bien son nom.
Le Berceau des Sens est le restaurant d'application de la
prestigieuse École Hôtelière de Lausanne qui n'est pas moins que
numéro une du classement des écoles hôtelières mondiales.
Si l'école est au sommet de sa gloire, son restaurant
d'application relève avec brio le défi de l'excellence et m'avait
déjà par deux fois émerveillé en tout points.
Bien au-delà de mes modestes considérations privées, le lieu
est référencé dans des guides de renom, ce qui a un caractère
tout à fait exceptionnel de par le statut de ce restaurant qui est
véritablement un restaurant-école. Généralement, les guides les
mettent de côté.
Généralement, car c'était sans compter sur l'équipe du Berceau
des Sens et de son Chef Meilleur Ouvrier de France Christophe
Pacheco, qui ont su mener le restaurant jusqu'à la mention dans le
Michelin avec un Bib gourmand, mais surtout depuis le 7 octobre 2013,
une éclatante entrée dans le Gault & Millau avec un beau 15/20
qui, je n'en doute pas, ne manquera pas d'aller ascendant !
J'ai donc pour la troisième fois franchi le seuil de ce beau
restaurant, moderne et élégant, d'un boisé chaleureux et épuré
qui convient parfaitement à l'ambiance du lieu, ce lundi 7 octobre
2013 pour participer à un repas culturel. En effet, en milieu
d'année, le Berceau des Sens a lancé un nouveau concept de dîners :
en des dates arrêtées, l'équipe de l'établissement propose deux
soirées thématiques avec un menu fixe élaboré par le talentueux
chef Meilleur Ouvrier de France Christophe Pacheco avec accord de
vins, le tout encadré d'intermèdes culturels prodigués à deux
voix par une docteur en histoire, Madame Azélina Jaboulet-Vercherre
et le chef sommelier de la maison, Monsieur Samuel Boissy. Ce soir-là
était la deuxième édition de ces dîners culturels et avait pour
titre « Autour de la région de Bourgogne ». Nous
attendaient un menu 6 plats avec apéritif et mignardises. Les plats
sont aux couleurs de la Bourgogne, emprunts de classicismes mais
raffinés et modernisés avec art. Mis en scène également, en
présence véritablement symbiotique, des vins de premier choix, tous
provenant du Domaine Faiveley à Nuits-Saint-Georges, véritable
ambassadeur des terroirs bourguignons, dont je ne peux que
recommander, dans un premier temps, une petite visite sur leur siteweb ou leur page Facebook.
Mais trêves de préambules, passons aux choses sérieuses !
Nous sommes d'abord accueillis au bar adjacent au restaurant pour
y déguster le premier vin de cette ballade culturelle, un Mercurey
« Clos Rochette » 2011, vin des Côtes Challonaises dont
le Domaine Faiveley possède le monopole. Un vin d'apéritif fort
bien choisi, minéral et frais, presque appétissant, qui accompagne
à merveille les bouchées qui nous sont proposées, des gougères,
petits choux tièdes farcis de fromage crémeux et des petits
feuilletés au fromage et jambon. Des petites bouchées simples et
bien réalisées dont il ne faudra pas abuser (enfin... quand-même
un peu)
au vu du repas qui suit !
On commence par l'amuse-bouche qui mettra en scène l'une des plus connues spécialités de la Bourgogne, l'escargot. Voici la « Briochette d’escargots aux cèpes » : une splendide petite bouchée de pâte aérée et savoureuse garnie d'un mollusque relativement dodu aux saveurs et à la texture si uniques et particulières, cuit à la perfection, couronné d'une tranche de ce noble champignon qu'est le cèpe. Une petite émulsion herbeuse et parfumée vient parfaire le plat, préparation dans laquelle il m'a semblé déceler du romarin. Beaucoup de travail déjà dans cette simple bouchée.
Accompagné de Chablis 1er Cru « Les Preuses » 2011, vin chablaisien, comme son nom l'indique, travail sur le Chardonnay, plutôt sur des teintes minérales et florales, très frais et autrement plus persistant en bouche que le précédent, de très bel accord avec notre amuse-bouche.
•
Suit en première entrée un « Foie gras de canard marbré
aux cassis et anguille fumée, Poire pochée aux poivres
aromatiques » : une assiette élégante et épurée
arrive, proposant deux bâtonnets de ce foie gras travaillé en
terrine, fondant et doux, de très belle qualité, mis en relief avec
une puissante anguille fumée dont le iodé se mêle formidablement
avec le gras du foie, et enfin une note de cassis pour achever
l'oeuvre. A ses côtés, sur une fleur de gelée de cassis en guise
de piédestal, une poire pochée absolument magnifiée par l'emploi
de poivres aux parfums exceptionnel, dont j'ai demandé le nom mais
n'ai pas été capable de les retenir, malheureusement. Splendide
création accompagnée d'un toast marbré (sans doute au cassis).
Accompagné de Meursault 1er Cru « Blagny » 2011, vin
des Côtes de Beaune ; un Chardonnay ample et gras qui ne perd
pas pour autant de sa fraîcheur et de sa minéralité. Un bonheur
avec cette entrée.
Place ensuite à l'une des assiette les plus accomplie de la
soirée (si réellement il faut faire un classement) : « Dos
de sandre en matelote, étuvée de légumes racines en mille-feuille,
Condiment de vieux jambon en fusette croustillante ». Un
travail époustouflant dans cette assiette qui nous présente, en
maître de cérémonie, un épais tronçon de poisson ayant reçu une
cuisson d'une exactitude parfaite, nappé d'une sauce matelote
excellente, parfumée et riche (vin, fumet, échalote, ...) et
couronnée d'une petite crème, jambon et herbettes de bel accord
gustatif en plus de visuel. En guise de marchepied pour le poisson,
un mille-feuille de légumes racine (au passage, merci de ne pas les
avoir qualifié d' « anciens » ou d' « oubliés »),
aux dominances de salsifi, sensiblement gratiné et tout à fait
excellent et enfin, sur le côté, une petite quenelle moelleuse dont
le contenu m'échappe malheureusement, douce en saveur et fort
plaisante. Ce plat fut un véritable bonheur.
Accompagné de Mercurey 1er Cru « Clos des Myglands » 2011, Pinot Noir des Côtes Challonaises, un vin rouge gourmand et extrêmement bien structuré, des tanins sages permettant un heureux accord avec le poisson, même d'eau douce. Un petit coup de coeur que ce vin qui accompagne un réel coup de coeur de plat.
Accompagné de Mercurey 1er Cru « Clos des Myglands » 2011, Pinot Noir des Côtes Challonaises, un vin rouge gourmand et extrêmement bien structuré, des tanins sages permettant un heureux accord avec le poisson, même d'eau douce. Un petit coup de coeur que ce vin qui accompagne un réel coup de coeur de plat.
Si le plat précédent fut parfait, la viande n'a rien à lui
envier, quoiqu'elle fut peut-être plus classique : « Noisette
de chevreuil piquée à la truffe, jus de venaison et moutarde à la
fleur de noisette et vanille, Pommes fondantes aux coings, dragées
au cacao épicé». Deux médaillons présentés en tournedos aux
saveurs fortes de chasse, d'une tendreté exemplaire et d'une qualité
de produit et de préparation tout à fait somptueuse juste parfumée
d'une truffe légère et discrète dosée avec exactitude. En guise
de couvre chef, un concassé de noisette à peine toastée un doigt
de vanille vient apporter un peu de douceur et de croustillant tandis
qu'une moutarde douce vient apporter du floral et de l'épicé, un
peu plus de relief gustatif à l'ensemble, et sera d'un exceptionnel
accord avec un jus de venaison bien corsé et très bien élaboré.
Pour compléter l'assiette, une pomme creusée comme une barquette,
garnie de coing taillé en brunoise, parfumé de dragée de cacao
croustillante à peine fondue et décorée de fines allumettes de
granny.
Un met de roi accompagné de vin royal, Echezeaux Grand Cru 2011, un Pinot Noir autrement plus puissant des Côte de Nuits, fruité, profond, très aromatique bien qu'encore jeune. Un grand vin qui ne pourra que se bonifier avec l'âge.
Un met de roi accompagné de vin royal, Echezeaux Grand Cru 2011, un Pinot Noir autrement plus puissant des Côte de Nuits, fruité, profond, très aromatique bien qu'encore jeune. Un grand vin qui ne pourra que se bonifier avec l'âge.
Durant tout le repas, nous avons pu jouir de pain frais fait
maison, sous forme de petits ballons au sésame, pavot, céréales,
ciabiatta, baguette ou pavé au levain, avec mention spéciale pour
le pavé au levain riche en saveurs et parfaitement exécuté. Avec
cela, sous une petite cloche, un beurre de très bonne qualité qui
développait un étonnant et présent goût herbeux dont je n'ai
jamais trouvé l'égal.
On ne fera pas l'impasse sur un fromage, et quel autre que le roi
des fromages bourguignons, le bien nommé Epoisses, ici une
production fermière, servie avec un pain sombre aux noix d'exquise
qualité. Le fromage est un véritable concentré d'étable qui
explose en bouche et emplit la bouche et les sinus de ses saveurs
prononcées, absolument excellente pour qui apprécie les fromages de
caractère.
Accompagné de Corton–Charlemagne Grand Cru 2011, un Chardonnay encore (évidemment, on est en Bourgogne où il reste le cépage roi en blanc) des Côtes de Beaune, très joliment fruité, très aromatique et assez complexe en bouche qui soulage heureusement la puissance et la persistance de ce fromage.
Accompagné de Corton–Charlemagne Grand Cru 2011, un Chardonnay encore (évidemment, on est en Bourgogne où il reste le cépage roi en blanc) des Côtes de Beaune, très joliment fruité, très aromatique et assez complexe en bouche qui soulage heureusement la puissance et la persistance de ce fromage.
Enfin en dessert, un Baba³ (lire « baba au cube »).
Au lieu d'être au rhum (ce qui trancherait un peu avec le thème de
la soirée), il se révèle parfumé au marc de Bourgogne. Autrement
plus costaud et franc en bouche qu'un rhum qui sera plus parfumé et
vanillé, le baba est présenté sous forme de cubes réguliers,
moelleux et fondants, au centre desquels une noisette de crème
vanille délicate et riche en saveur repose paisiblement. Une
marmelade d'orange amère particulièrement bien exécutée vient
compléter l'assiette qui s'avère être une étonnante réussite,
bien plus légère qu'il n'y paraissait.
Tout beau voyage se doit d'avoir une fin, et on la rend la plus
douce possible avec un bon café accompagné de deux mignardises
élégantes et plaisantes, une pâte de fruits aux fruits rouges très
bonne (et je ne suis pas très friand des pâtes de fruits), et d'une
tartelette au citron de présentation très raffinée et de très bon
goût.
Que dire pour conclure ? Commençons par quelques simples
considérations : un tel repas, accompagné de tels vins, avec
minérales comprises à volonté, le tout pour 150 CHF, c'est déjà
exceptionnel. Si on met en parallèle l'aspect événementiel et
l'intérêt culturel bien réel, cela devient presque indécent !
C'était un grand moment dans un établissement déjà grand, et qui
ne fera que se développer et grandir.
J'aimerais souligner l'excellence du service de soir qui, malgré
le fait que ce fut le premier soir d'oeuvre pour ces jeunes étudiants
de première année, démontra un grand savoir faire et
professionnalisme. A la rigueur un oeil observateur pouvait remarquer
quelques tremblements et regards cherchant l'approbation des maîtres
de formation, mais c'était particulièrement discret. Bravo à eux !
Je ne saurais conclure autrement ma chronique qu'en saluant
l'obtention d'une récompense oh combien méritée pour toute
l'équipe de ce bel établissement : l'entrée dans le célèbre
guide Gault & Millau et non des moindres, un 15/20 obtenu dès le
début ; non seulement la note d'entrée est très élevée,
mais surtout, pour une école hôtelière, c'est une distinction des
plus rarement accordée. Et c'est sans aucun doute que je me permets
d'affirmer que la note va probablement aller en pente ascendante !
Bravo, bravo, bravo et merci infiniment...
...
...
et surtout à bientôt !
Le Berceau des Sens
Route de Cojonnex 18
1000 Lausanne
Vaud, Suisse
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