Ce samedi 9 juillet 2016 a été
organisé un repas entre bloggeurs et amis, 8 personnes au total, au
restaurant Le Délicieux, à Pully, un restaurant chinois installé
depuis environ une année. Qu'est-ce qui nous a ainsi attirés là-bas
particulièrement? Eh bien l'opportunité de découvrir une cuisine chinoise
différente. Globalement, nous apprécions tous la cuisine chinoise
mais sommes lassés de trouver la même carte un peu partout, les
mêmes préparations d'une cuisine chinoise standardisée à nos
petits goûts helvètes (je n’entamerai pas à nouveau le débat).
Au Délicieux, le chef, originaire de
Hong-Kong, aime manifestement véritablement ce qu'il fait.
Du coup, quand un groupe d’hurluberlus
lui demandent de faire une proposition de menu vraiment typique et
traditionnel, prêts à assumer le choc culturel, il accepte et se met en
quatre pour nous concocter un repas vraiment représentatif. Le menu
a été élaboré sous l’œil expert d'un certain Kwong Tran
(Foodaholic) qui est un habitué du restaurant et surtout fin
connaisseur de cuisine chinoise; pour ce repas, nous aurons donc une soupe, quatre
entrées, neuf plats et un dessert.
Le Délicieux est un joli petit
restaurant, situé au centre de Pully, très facile d'accès, à
l'entrée d'une zone piétonne calme. La devanture est tout ce qu'il
y a de plus simple, quelques tables et chaises sur la terrasse et un
intérieur bien aéré, assez petit, dans des tons blanc, noir et
rouge, assez sobre et joli, aux tables pas trop serrées, noires,
dressées tout en simplicité et entourées de sièges confortables.
La carte "normale" du Délicieux est
assez simple, proposant les standards habituels mais réalisés avec
soin (dumplings maisons, sauces et préparations maison; cela fait la
différence), et quelques plats moins fréquents tels que le poisson
vapeur et autre sélection de spécialités plus intéressantes et
moins habituelles, à prix tout à fait raisonnable.
En parallèle et depuis peu, une carte
de plats sur demande est proposée et à n'en point douter, c'est là
que le Délicieux pourra se démarquer. Ces plats ne sont pas sur
demande car particulièrement raffinés ou avec des produits
particulièrement riches, non, mais juste parce qu'ils sont vraiment
très traditionnels et demandent un temps de préparation et des
ingrédients plus particuliers. Toutes les cartes sont disponibles sur leur page Facebook, et cela mérite d'y jeter un coup d'oeil.
Ne perdons pas de temps et passons au
repas qui, vous le verrez, ne nous laissera plus-même la place, à
l'image de Mr Croesote, pour une "thin mint".
On commence avec une « Soupe aux
ailerons de requin ». Un bouillon exhalant essentiellement des
odeurs de sauce soja, de sésame et de champignons shii-take et
poivre, de consistance assez épaisse, généreusement garni de
poisson en morceaux relativement petits et effilés sous l'effet de
la cuisson, de champignons shii-take et de vermicelles croquantes
entre autres ingrédients. La saveur du poisson est délicate et peu
marquée, la chair est blanche et assez dense. C'est la première
fois que je goûte à une telle soupe très bonne, quoique le requin aurait pu être de l'aile de raie sans que l'on n'en voie la différence.
Puis arrivent les entrées:
D'abord une salade de méduse. Si cela
paraît impressionnant de manger un tel produit dans nos contrées,
c'est pourtant une denrée passablement consommée en Asie. C'est
d'ailleurs la seconde fois que je peux en déguster, la première
ayant été une découverte londonienne relatée ici.
La créature a été découpée en
filaments assaisonnés de manière très simple avec un peu de sel,
sûrement un peu de vinaigre et des saveurs peu prononcées. Il en
résulte une salade d'une grande fraîcheur, une texture sensiblement
croquante avec un côté presque-même désaltérant.
Une salade d'algues et peau de tofu.
Jolie salade, la peau de tofu donne une saveur ronde aux algues un
peu iodées et croquantes. Parfumée essentiellement de feuilles de
coriandre et de cacahouètes, l'association fut une surprise vraiment
plaisante et changeant des sauces habituelles de salades d'algues.
Un plat garni de lamelles de tofu
soyeux et d'oeufs de cent ans. Connaissez-vous ces œufs étonnants?
une délicatesse asiatique, qui ont été oubliés dans un mélange de boue riche en chaux, de paddy (riz non décortiqué), de cendre, de sel et de feuilles de thé; puis laissés fermentés jusqu'à ce que le processus les « cuisent »
progressivement. Le résultat est assez étonnant: le blanc de l’œuf
devient noirâtre translucide tandis que le jaune vire au vert.
Certes, cela paraît peu ragoûtant, d'autant qu'il faut souligner
que cela dégage une odeur plutôt forte et soufrée au moment de
l'écaler. Passés ces détails, la saveur est celle de l’œuf, en
plus prononcé, avec un petit quelque chose de balsamique en arrière
bouche. Le goût n'a rien de la violence de l'odeur (toutefois vous
remarquerez très vite qu'en manger un comme un œuf dur vous
conférera une haleine de chacal malade durant quelques heures).
Bref, le plat présente les œufs assez finement émincé sur des tranches de tofu soyeux, le tout parfumé
d'une sauce douce-acidulée au soja. Le résultat est très gourmand et ôte
toutes les caractéristiques répulsive de l’œuf de cent ans: la fraîcheur fade du tofu se mêle harmonieusement à la puissance de l’œuf.
N'oublions pas ma fascination maladive pour le processus de fermentation et les produits qui en résultent... une entrée qui n'a pu que me combler.
N'oublions pas ma fascination maladive pour le processus de fermentation et les produits qui en résultent... une entrée qui n'a pu que me combler.
Quatrième entrée, autre délicatesse,
les pattes de poulet. Servies dans des paniers vapeur, les pattes ont
manifestement été confites dans une sauce soja riche et sucrée,
avec sans doute une pointe d'alcool. La dégustation se fait de façon
particulière puisqu'il faudra « sucer » les pattes pour
en extraire la chair gélatineuse entourant les os. Certes, ça vend
pas du rêve dit comme cela, mais c'était une vraie découverte et
le résultat était d'une grande gourmandise!
Après ces entrées un peu en mode
« warrior », on poursuivra le repas avec des plats
visant toujours autant à la découverte d'une cuisine chinoise plus
authentique et traditionnelle, 9 au total, servis plus ou moins tous
en même temps.
Du gâteau de riz au chou chinois piquant. Le gâteau de riz est une préparation à base de farine de riz cuite très longtemps pour obtenir un certain moelleux. C'est naturellement assez fade en goût et s'apprécie souvent en soupe ou servi en sauce assez relevée, relevée, au chou chinois mariné dans une sauce piquante, peut-être un peu fermentée du genre « kimchi » coréen. C'est plaisant et j'aime bien la texture de ce gâteau de riz.
Un plat de moules, sautées au
gingembre et poireaux. C'était étonnant de se voir servir des
moules en restaurant chinois mais elles étaient excellentes,
correctement cuites et de très bonne qualité et les saveurs étaient
fraîches et délicates.
Un plat de tripes sautées à la sauce piquante (j'vous vois en train de verdir). Les tripes sont parfaitement préparées, manifestement mijotées longuement dans une sauce un peu relevée et acidulée, augmentée de quelques tranches d'oignon, poireau, carottes, poivrons, ce qui les rend très moelleuses et vraiment imbibée de cette sauce donnant beaucoup de saveur.
Moins audacieux mais différent des
habituelles fritures, des travers de porc marinés dans une sauce un
peu relevée apparemment à base de vin de riz, du piment, haricots noirs fermentés, le tout cuit vapeur. Le résultat est très tendre et
plein de saveur.
Des calmars sauce shasha. Des calamars parfaitement cuits, très tendres et savoureux, dans une sauce pleine de saveurs, à base d'huile de soja, ail, échalote, piment et poisson séché. C'est très riche en goûts.
Un poulet fermier cuit vapeur, servi froid, accompagné d'une sauce au gingembre et
oignon nouveau. C'est très délicat en bouche, la viande est très
bien cuite, encore bien moelleuse. Un plat que je connaissais déjà
et que j'apprécie beaucoup.
Autre plat très doux, l'omelette
vapeur au porc haché. Jolie préparation, fine en bouche, légère
et mousseuse, c'est frais et plaisant.
Une assiettes de langues de canard
frites au sel et poivre. La première fois que je goûte à cette
délicatesse, ma foi vraiment très plaisante, augmentée de petits
légumes sautés. La langue de canard n'a pas de saveur autrement
prononcée mais la préparation est vraiment excellente. Dans le
canard comme dans le cochon, tout est bon.
Enfin, un plat de nouilles "He
fen" sautées. Les nouilles He fen sont des nouilles de riz
irrégulières car la pâte est préparée à la main et découpée
au couteau. Elles étaient ici sautées avec des petits légumes et
des morceaux de bœuf marinés, avec une sauce à base de soja. Si
les nouilles sautées ne m'intéressent généralement pas vraiment,
il faut admettre qu'ici, c'était vraiment un plat à part entière
vraiment délicieux.
Autant dire qu'il a fallu s'accrocher
pour finir tout cela: tous les plats étaient comptés à 1.5x leur
quantité. Nous nous sommes naturellement abstenus d'ajouter à cela
du riz, où aurions-nous pu le mettre?
D'autant qu'avec ce menu, il y avait un
dessert plutôt intéressant. Un boule de glace aux haricot mungo
avec des beignets de gelée de lait. On commence à connaître la
glace aux haricots rouges azuki et celle au haricot mungo suit le
même principe. Probablement faite maison, la glace n'est pas trop
sucrée et assez consistante. De couleur vert pâle, on y trouve de
petits morceaux de haricots réduits grossièrement en purée. C'est
agréable et rafraichissant. Les beignets, une fois ouverts en deux,
laissent entrevoir une pâte de lait sans doute préalablement épaissie
à la farine de riz puis légèrement gélifiée. Le dessert n'était
pas transcendant (et peut-être un peu de trop, admettons-le) mais
néanmoins agréable, original et bien réalisé.
Durant tout le repas, nous avons bu du thé froid maison, très rafraîchissant et agréable et nous avons conclu le repas par un café. Le tout nous est revenu à env. 90.- par personnes. Notons que nous avions à cœur que les produits choisis soient de qualité: poulet fermiers, fruits de mer frais, produits du marché, etc... Ajoutons encore que les préparations étaient maison et que les sauces-même m'ont semblé maison, contrairement à l'essentiel des restos chinois que l'on trouve par chez nous qui jugeront plus pratique d'ouvrir un bocal.
C'est véritablement agréable de
pouvoir découvrir une cuisine chinoise plus vraie, plus populaire et
traditionnelle, bien loin des standards habituels de bœuf
caramélisés et autres poulet à l'aigre doux. Rappelons que s'il
s'agissait certes d'un menu exceptionnel, ces plats et bien d'autres
sont disponibles sur demande et, à n'en point douter, si un client
ayant voyagé en Chine vient auprès du chef avec une demande très
typique découverte lors de son périple, ce dernier veillera à
contenter ses attentes et, qui sait, ajoutera peut-être le plat en
question à sa proposition sur demande.
Merci à Kwong de Foodaholic d'avoir
organisé ce repas et aux convives (dont Lukas de Guerilla Gourmande
et Nathalie de La Semaine d'une Gourmette) présent ce jour de
l'avoir rendu si joyeux!
Avenue du Prieuré 21
1009 Pully
Vaud, Suisse