Forcément, de loin, on
pense Allemagne, on pense cuisine, on pense viande, saucisse,
Schnizeln, Torte, le tout arrosé d'un bon bock de bière. Pour être
allé à Münich il y a déjà bien 8 ans, Freiburg il y a 6 ans, il
faut bien avouer que cela répondait jusqu'alors plutôt bien à
l'image avec, comme variation essentielle, la cuisine turque qui
prendra surtout la forme du döner. N'oublions pas en effet que
l'Allemagne aujourd'hui est le pays qui possède la plus grande
communauté turque hors de Turquie.
Berlin, au même titre
que l'essentiel des grandes capitales du monde, n'est pas vraiment
représentative de bon nombre d'idées préconçues sur ce pays,
notamment sur la cuisine. Il n'y a pas vraiment de ces Biergarten
ultra traditionnels pour ne citer qu'un exemple mais on les verra
plus volontiers un peu modernisés, retravaillés, revisités, tant
dans le cadre que dans l'assiette, sans pour autant rejeter origines
et traditions. Une Berlin moderne, jeune, innovante, vivante,
également dans la restauration.
Fin avril, début mai, me
voilà donc en bref séjour (3 jours entiers) en famille. Trois
jours, c'est bref, et j'aurai à cœur de sélectionner trois tables
de trois genres différents, soigneusement choisis, pour découvrir
et faire découvrir à mes comparses quelque chose de nouveau. Et
j'espère maintenant vous faire découvrir ce visage de Berlin.
30 avril 2015, après une
première journée de balade à travers un Berlin au temps un peu
mitigé, à la découverte de l'essentiel des sites « carte
postale » mais également de la vie et de la diversité
berlinoise, on fera volontiers comme premier choix gastronomique une
roborative, généreuse et confortable cuisine allemande avec sa
touche berlinoise.
Nous voilà donc dans la
partie orientale de la ville dans le quartier fréquenté de
Prenzlauer, où l'Eberswalder Strasse vous mènera, si vous vous y
aventurez, au populaire Mauerpark et au mémorial du mur, un quartier
qui correspond bien à l'idée que l'on pourrait se faire de Berlin
Est de nos jours: jeune, alternatif, vivant et moderne, dans un écrin
d'ancienneté et d'histoire. On longera quelques minutes la
Kastanienallee jusqu'à ce que l'on se retrouve, sur la droite,
devant une enseigne un peu décalée ouvrant sur ce qui, de
l'extérieur, ressemble à s'y méprendre à un terrain vague. C'est
pourtant là que l'on dînera.
On s'aventurera sur une
allée dallée, entourée de terre, on croisera un parking à vélo
et on s'amusera à s'approcher d'une bâtisse qui a un petit quelque
chose d'habitat temporaire ou de mobilhome, au pied d’une structure
industrielle en tôle ondulée. Une petite terrasse juste devant,
toiles blanche et rouge, donne un côté presque comique et en même
temps assez irrésistible. Mais ce n'est pas tout!
En face de la bâtisse,
une grande terrasse à ciel ouvert, ponctuée de châtaigniers, au
petit air du buvette, où, malgré le temps et la température, une
poingée de personnes s'y rassemble. Il y a fort à penser que le
lieu est bondé en belle période. Ce côté est la partie
« Biergarten » du lieu, dont la naissance remonte à
1837, faisant de lui le plus vieux Biergarten de Berlin, abreuvant
les habitants de diverses sortes de bières et autres boissons, ainsi
que les nourrissant aujourd'hui d'une cuisine de type fast/fingerfood
traditionnelle qui semble, à la lecture de la carte, savoureuse et à
prix des plus dérisoires. Je ne peux qu'encourager une visite de
l'onglet descriptif de leur site, qui raconte avec force détails
l'histoire du lieu.
La bâtisse premièrement
décrite est donc le côté restaurant, et c'est là que l'on dînera.
En passant la porte, il est difficile d'imaginer ce que l'on trouvera
à l'intérieur! à peine entré, on appréciera le joyeux brouhaha
qui habite la salle et qui témoigne de son degré de remplissage. On
notera, au passage, que le lieu sera plein du début à la fin, les
tables desservies étant aussitôt repourvues. Autant dire qu'il est
essentiel de réserver en avance, éventuellement de se montrer
flexible sur l'horaire. En face, on remarquera le très beau et long
bar, lumineux, en bois, aux verres resplendissants et surmonté de
bouteilles en terre cuite, vestige des temps anciens où la bière
était servie dans ces récipients. Le reste de la salle est simple
et pleine de charme: parquet au sol, haute plinthes de bois foncé,
murs blancs, lumières tamisée. Au fond, une estrade cerclée de
rideaux et de lampes où l'on verrait volontiers se produire quelque
groupe musical ou un spectacle burlesque. Un peu partout, assez
serrées, des petites tables de bois, laissées nues, juste pourvues
d'un pot contenant fourchettes, couteaux et serviettes en papier, et
des chaises assorties, assez brutes, correspondant pleinement aux
lieux.
Le personnel n'est pas
nombreux en rapport au nombre de couverts et la taille de la salle,
mais hyper efficace, assez jeune, vêtu de noir, ne manquant pas
d'allure, souriant et disponible. On sera d'ailleurs vite pris en
charge et menés à notre table au pieds de l'estrade.
La carte en mains assez
rapidement, on appréciera le fait qu'elle soit datée, courte,
tenant sur une page. Le restaurant a à cœur de servir une cuisine
authentiquement berlinoise régie par les saisons, le marché et les
envies du moment. C'est d'ailleurs l'asperge blanche qui est alors à
l'honneur, en soupe ou proposée avec divers accompagnements. On
trouvera des soupes, des salades, viandes en sauce ou grillée, un
poisson et des desserts. Il n'y a pas vraiment d'entrée ou de plat
et on remarquera que les assiettes des tables alentours sont si bien
servie qu'un unique plat devrait suffire à arriver au bout du plus
avide appétit. La transparence quant à la provenance et la qualité
des préparations est plutôt exceptionnelle, mentionnant très
clairement si tel ou tel plat contient des conservateurs,
antioxydant, acidifiants ou phosphates (et il n'y en a pas des
masses!). Je ne sais pas s'il s'agit d'une loi qui demande cela, mais
si ce n'est pas le cas, chapeau bas! Last but not least, les prix
sont vraiment dérisoires, en mettant en rapport quantités et prix
de matières premières (veau, asperge, etc...).
Côté boissons, la carte
ne vise à nouveau pas à l'exhaustivité mais n'empêche pas le
choix. Tout sent la qualité, des bières pression et bouteilles, des
vins à tendance bio/nature, une quantité gigantesque d'alcools
forts et minérales, toujours dans des gammes de prix très
raisonnables.
Bon, je ne me suis que
déjà trop étalé dans mon introduction. Ma foi, on ne se refait
définitivement pas! Mais voilà les plats et boissons commandés.
Très vite alors, on nous
portera un pain mi-blanc fraîchement coupé. Ce dernier est de bonne
qualité. A ses côtés, deux coupelles de crème aigre à la
ciboulette simple et plaisant, posée d'entrée de jeu, que l'on
consommera avec du pain dans un premier temps pour les plus affamés,
et avec un des plats de la table (pris par trois des convives), que
je m’apprête à décrire. Les plats arriveront après une petite
attente, ce qui est tout à fait normal. Rien de trop compte tenu du
remplissage de la salle et du temps de préparation des plats.
Trois convives, donc, se
laisseront tenter par une proposition du moment, l'asperge. Une
demi-portion d'asperge, de grosses asperges blanches parfaitement
cuites, braisées et beurrées, changeant heureusement de
l'habituelle cuisson à l'eau, saupoudrée au dernier moment d'un peu
de chapelure. La qualité du produit est assez exceptionnelle et les
quantités, pour une demi-portion, pas chiches du tout!
Dans la même assiette,
trois pommes de terre toute en simplicité, bien cuites et de bonne
qualité, également saupoudrées de chapelure.
Dans une assiette à
côté, une portion de Schnitzeln vraiment très généreuse (qui
laisse penser que si on prend comme plat une Schnitzel, on veillera à
avoir vraiment très faim!). La viande, du veau comme la tradition le
veut, est de belle qualité, en fine escalopes tendres et goûteuses
témoignant d'une cuisson maîtrisée. La chapelure est fine et
croquante, l'ensemble est justement assaisonné et servi avec un
quartier de citron. Un plat qui aura beaucoup plu et auquel on ne
reprochera peut-être qu'une quantité un peu élevée de beurre dans
les asperges (pour chipoter).
Pour ma part, je
m'intéresserai à un autre plat hautement traditionnel: le
Sauerbraten. Pour utiliser une référence connue, c'est globalement
les mêmes principes qu'un bœuf bourguignon mais façon allemande.
Un très gros pavé de bœuf de très bonne qualité, longuement
mariné dans du vinaigre et des épices (jusqu'à 48h de marinade),
braisé et lentement cuit, servi dans une sauce aigre-douce de
vinaigre et de bière aux épices avec un arrière goût de raisins
secs. La viande est tendre, se défait toute seule, savoureuse et
magnifiée par cette sauce gourmande, riche et très équilibrée en
saveurs. A ces côtés, des carottes très bonne, assez beurrées à
nouveau et une excellente purée très bien exécutée. Un plat
réconfortant et gourmand.
J'ai commandé une petite
salade à côté. Une grande assiette profonde regorgeant de feuilles
diverses bien fraîches et parsemée de graines de sésame et
tournesol. La vinaigrette est un petit bémol car m'a fait
furieusement penser à une de ces sauces à l'italienne industrielle
qui ne fait pas honneur au lieu et au contenu de l'assiette. De
parfaite, elle passera à plaisante.
On constatera assez
aisément que les assiettes sont si généreusement servies qu'elles
arriveront au bout des appétits les plus coriaces, et cela avec
beaucoup de plaisir.
Nous ne résisterons
néanmoins pas à nous partager une portion d'Apfelstrudel pour le
dessert. Une portion à nouveau fort généreuse d'un strudel qui
n'était pas tout à fait semblable à ce que je connais du
strudel traditionnel. Plutôt que d'être roulé plusieurs fois, il
n'avait qu'une seule couche extérieure de pâte un peu molle
(contrairement au croustillant typique et, fondamentalement, désiré).
La farce, elle, est parfaite. Dés de pommes fondants, riche en noix
et amandes, humidifié de compote de pommes et zeste d'agrume,
excellente. Le tout est servi dans sa pataugeoire de sauce vanille de
belle exécution. Il semblerait toutefois qu'il n'y ait pas une seule manière de traiter la pâte à strudel et que celle-ci n'est pas moins traditionnelle qu'une autre. Un dessert très bon et plaisant, quoiqu'on aurait
apprécié, pour le coup, un peu plus de croustillant pour que cela soit parfait.
Côté boissons, eau
gazeuse et plate, un coca seront les sources d'hydratation. Je ne
résisterai pas à goûter à une de leur pressions, la « Prater
Lager Schwarz », une bière noire presque étonnamment fluide
et désaltérante, avec un joli gaz équilibré et une saveur très
maltée et agréable.
Un verre de vin rouge
sera pris à table, un vin du Rioja Bio « Lar de Sotomayor
Tempranillo Écológica » 2011 de la Bodega
Demeco De Jarauta, un vin très plaisant aux notes de cacao, de
cuir et d'épices derrière un fruit riche.
Tout cela nous reviendra
à quelques 124.70 euros.
Entouré d'un service
efficace et agréable, on a passé, dans ce cadre particulier, un
repas très plaisant et réconfortant, avec des produits choisis,
très bien exécutés et généreusement servis. Le Prater Garten est
une expérience d'immersion dans la vie berlinoise et promet un
moment confortable et agréable, sans aucun chichi!
Kastanienallee 7 – 9,
Prenzlauer Berg
10435 Berlin
10435 Berlin
Allemagne
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